«prie respectueusement la Cour :
a) de dire et juger que, contrairement à ce que prétend la Fédération de Russie, aucun acte de génocide, tel que défini à l’article III de la convention sur le génocide, n’a été commis dans les oblasts ukrainiens de Louhansk et de Donetsk ;
b) de dire et juger que la Fédération de Russie ne saurait licitement prendre, au titre de la convention sur le génocide, quelque action que ce soit en Ukraine ou contre celle-ci visant à prévenir ou à punir un prétendu génocide, sous le prétexte fallacieux qu’un génocide aurait été perpétré dans les oblasts ukrainiens de Louhansk et de Donetsk ;
c) de dire et juger que la reconnaissance, par la Fédération de Russie, de l’indépendance des prétendues «République populaire de Donetsk» et «République populaire de Louhansk», le 22 février 2022, est fondée sur une allégation mensongère de génocide et ne trouve donc aucune justification dans la convention sur le génocide ;
d) de dire et juger que l’«opération militaire spéciale» annoncée et mise en œuvre par la Fédération de Russie à compter du 24 février 2022 est fondée sur une allégation mensongère de génocide et ne trouve donc aucune justification dans la convention sur le génocide ;
e) d’exiger de la Fédération de Russie qu’elle fournisse des assurances et garanties de non-répétition en ce qui concerne la prise par elle de toute mesure illicite en Ukraine et contre celle-ci, notamment l’emploi de la force, en se fondant sur son allégation mensongère de génocide ;
f) d’ordonner la réparation intégrale de tout dommage causé par la Fédération de Russie par suite de toute action fondée sur son allégation mensongère de génocide.»
«a) La Fédération de Russie doit suspendre immédiatement les opérations militaires commencées le 24 février 2022 ayant pour but et objectif déclarés la prévention et la répression d'un prétendu génocide dans les oblasts ukrainiens de Donetsk et de Louhansk.
b) La Fédération de Russie doit veiller immédiatement à ce qu'aucune des unités militaires ou unités armées irrégulières qui pourraient agir sous sa direction ou bénéficier de son appui, ni aucune organisation ou personne qui pourrait se trouver sous son contrôle, sa direction ou son influence ne prenne de mesures tendant à la poursuite des opérations militaires ayant pour but et objectif déclarés la prévention et la répression d'un génocide que commettrait l'Ukraine.
c) La Fédération de Russie doit s'abstenir de tout acte susceptible d'aggraver ou d'étendre le différend qui constitue l'objet de la requête ou d'en rendre le règlement plus difficile, et donner des assurances à cet égard.
d) La Fédération de Russie doit rendre compte à la Cour des mesures prises pour exécuter l'ordonnance en indication de mesures conservatoires dans un délai d'une semaine à compter de la date de celle-ci, puis à intervalles réguliers, dans les délais qui seront fixés par la Cour.»
«en application du paragraphe 4 de l'article 74 du Règlement de la Cour, ... d'inviter la Fédération de Russie à cesser sur-le-champ toute action militaire sur son territoire dans l'attente de la tenue d'une audience, de manière que toute ordonnance de la Cour sur la demande en indication de mesures conservatoires puisse avoir les effets voulus».
Au nom de l’Ukraine :
M. Anton Korynevych,
M. Jean-Marc Thouvenin,
M. David M. Zionts,
Mme Marney L. Cheek,
M. Jonathan Gimblett,
M. Harold Hongju Koh,
Mme Oksana Zolotaryova.
«a) La Fédération de Russie doit suspendre immédiatement les opérations militaires commencées le 24 février 2022 ayant pour but et objectif déclarés la prévention et la répression d'un prétendu génocide dans les oblasts ukrainiens de Donetsk et de Louhansk.
b) La Fédération de Russie doit veiller immédiatement à ce qu'aucune des unités militaires ou unités armées irrégulières qui pourraient agir sous sa direction ou bénéficier de son appui, ni aucune organisation ou personne qui pourrait se trouver sous son contrôle, sa direction ou son influence ne prenne de mesures tendant à la poursuite des opérations militaires ayant pour but et objectif déclarés la prévention et la répression d'un génocide que commettrait l'Ukraine.
c) La Fédération de Russie doit s'abstenir de tout acte susceptible d'aggraver ou d'étendre le différend qui constitue l'objet de la requête ou d'en rendre le règlement plus difficile, et donner des assurances à cet égard.
d) La Fédération de Russie doit rendre compte à la Cour des mesures prises pour exécuter l'ordonnance en indication de mesures conservatoires dans un délai d'une semaine à compter de la date de celle-ci, puis à intervalles réguliers, dans les délais qui seront fixés par la Cour.»
«Les différends entre les Parties contractantes relatifs à l'interprétation, l'application ou l'exécution de la présente Convention, y compris ceux relatifs à la responsabilité d'un Etat en matière de génocide ou de l'un quelconque des autres actes énumérés à l'article III, seront soumis à la Cour internationale de Justice, à la requête d'une partie au différend.»
L'Ukraine soutient en outre que le différend entre les Parties concerne la question de savoir si, en conséquence de son affirmation unilatérale selon laquelle un génocide serait en cours, la Fédération de Russie dispose d'une base juridique valable pour entreprendre une action militaire en Ukraine et contre celle-ci afin de prévenir et de punir un génocide en vertu de l'article premier de la convention sur le génocide. Elle estime que la Fédération de Russie «a inverti le propos de la convention sur le génocide», en formulant une allégation mensongère de génocide pour commettre des actes qui constituent de graves violations des droits humains de millions de personnes sur l'ensemble du territoire ukrainien. Elle affirme que, plutôt que d'entreprendre une action militaire pour prévenir et punir un génocide, la Fédération de Russie aurait dû saisir les organes des Nations Unies au titre de l'article VIII de la convention ou se fonder sur l'article IX de celle-ci pour saisir la Cour. Elle se dit en profond désaccord avec la façon dont la Fédération de Russie interprète, applique et exécute la convention. Se référant entre autres à une déclaration du ministère des affaires étrangères ukrainien en date du 26 février 2022, elle soutient que la Fédération de Russie «ne pouvait pas ne pas avoir connaissance de ce que ses vues se heurtaient à l'«opposition manifeste»» de l'Ukraine.
En application de l'article VIII de la convention, une partie contractante qui estime qu'un génocide a lieu sur le territoire d'une autre partie contractante «peut saisir les organes compétents de l'Organisation des Nations Unies afin que ceux-ci prennent, conformément à la Charte des Nations Unies, les mesures qu'ils jugent appropriées pour la prévention et la répression des actes de génocide ou de l'un quelconque des autres actes énumérés à l'article III». En outre, ladite partie contractante peut, en application de l'article IX, soumettre à la Cour un différend relatif à l'interprétation, l'application ou l'exécution de la convention.
«[m]aintenir la paix et la sécurité internationales et à cette fin : prendre des mesures collectives efficaces en vue de prévenir et d'écarter les menaces à la paix et de réprimer tout acte d'agression ou autre rupture de la paix, et réaliser, par des moyens pacifiques, conformément aux principes de la justice et du droit international, l'ajustement ou le règlement de différends ou de situations, de caractère international, susceptibles de mener à une rupture de la paix».
La Cour,
Indique à titre provisoire les mesures conservatoires suivantes :
1) Par treize voix contre deux,
La Fédération de Russie doit suspendre immédiatement les opérations militaires qu'elle a commencées le 24 février 2022 sur le territoire de l'Ukraine ;
POUR : Mme Donoghue, présidente ; MM. Tomka, Abraham, Bennouna, Yusuf, Mme Sebutinde, MM. Bhandari, Robinson, Salam, Iwasawa, Nolte, Mme Charlesworth, juges ; M. Daudet, juge ad hoc ;
CONTRE : M. Gevorgian, vice-président ; Mme Xue, juge ;
2) Par treize voix contre deux,
La Fédération de Russie doit veiller à ce qu'aucune des unités militaires ou unités armées irrégulières qui pourraient agir sous sa direction ou bénéficier de son appui, ni aucune organisation ou personne qui pourrait se trouver sous son contrôle ou sa direction, ne commette d'actes tendant à la poursuite des opérations militaires visées au point 1) ci-dessus ;
POUR : Mme Donoghue, présidente ; MM. Tomka, Abraham, Bennouna, Yusuf, Mme Sebutinde, MM. Bhandari, Robinson, Salam, Iwasawa, Nolte, Mme Charlesworth, juges ; M. Daudet, juge ad hoc ;
CONTRE : M. Gevorgian, vice-président ; Mme Xue, juge ;
3) A l'unanimité,
Les deux Parties doivent s'abstenir de tout acte qui risquerait d'aggraver ou d'étendre le différend dont la Cour est saisie ou d'en rendre le règlement plus difficile.
M. le juge GEVORGIAN, vice-président, joint une déclaration à l'ordonnance ; M. le juge BENNOUNA et Mme la juge XUE joignent des déclarations à l'ordonnance ; M. le juge ROBINSON joint à l'ordonnance l'exposé de son opinion individuelle ; M le juge NOLTE joint une déclaration à l'ordonnance ; M. le juge ad hoc DAUDET joint une déclaration à l'ordonnance.
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