Dans sa requête, le Guyana entend fonder la compétence de la Cour, en vertu du paragraphe 1 de l'article 36 du Statut de la Cour, sur le paragraphe 2 de l'article IV de l'«accord tendant à régler le différend entre le Venezuela et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la frontière entre le Venezuela et la Guyane britannique» signé à Genève le 17 février 1966 (ci-après l'«accord de Genève»). Il explique que, conformément à cette dernière disposition, le Guyana et le Venezuela «ont convenu de conférer au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies le pouvoir de choisir le moyen de règlement du différend [et que] celui-ci en a fait usage le 30 janvier 2018, optant pour le règlement judiciaire par la Cour».
«En l'absence de toute disposition de l'article IV, paragraphe 2, de l'Accord de Genève de 1966 (ou de l'article 33 de la Charte des Nations Unies, auquel il se réfère) sur i) la juridiction de la Cour et ii) les modalités de sa saisine ; l'établissement de la juridiction de la Cour exige, selon une pratique bien établie, à la fois un consentement exprès à la juridiction de la Cour donné par les deux Parties au différend, et un accord commun des Parties notifiant la soumission du différend à la Cour.
Le seul objet et propos et effet juridique de la décision du Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, du 30 janvier 2018, conformément au paragraphe 2 de l'article IV de l'Accord de Genève, est de «choisir» un mécanisme particulier de règlement des différends pour arriver à une solution amiable du différend.
D' autre part, la juridiction de la Cour, en vertu de l'article 36 du Statut, et les modalités de sa saisine, conformément à l'article 40 du Statut, ne sont pas régies par l'Accord de Genève. En l'absence d'un accord des Parties exprimant leur consentement à la juridiction de la Cour en vertu de l'article 36, et en l'absence d'un accord des Parties acceptant que le différend puisse être porté unilatéralement et non conjointement devant la Cour en vertu de l'article 40, il n'y a aucune base pour la juridiction de la Cour en ce qui concerne la prétendue «Requête du Guyana».
Dans ces circonstances, et compte tenu des considérations mentionnées ci-dessus, la République Bolivarienne du Venezuela ne participera pas à la procédure dont la République coopérative du Guyana a l'intention d'engager par le biais d'une action unilatérale.»
Lors de la même réunion, le Guyana a déclaré qu'il désirait que la Cour poursuive l'examen de l'affaire.
«[L]e Guyana prie [la Cour] de dire et juger que :
a) la sentence de 1899 est valide et revêt un caractère obligatoire pour le Guyana et le Venezuela, et que la frontière établie par ladite sentence et l'accord de 1905 est valide et revêt un caractère obligatoire pour le Guyana et le Venezuela ;
b) le Guyana jouit de la pleine souveraineté sur le territoire situé entre le fleuve Essequibo et la frontière établie par la sentence arbitrale de 1899 et l'accord de 1905, et que le Venezuela jouit de la pleine souveraineté sur le territoire situé à l'ouest de ladite frontière ; que le Guyana et le Venezuela sont tenus au respect mutuel, plein et entier, de leur souveraineté et de leur intégrité territoriale sur la base de la frontière établie par la sentence arbitrale de 1899 et l'accord de 1905 ;
c) le Venezuela doit immédiatement se retirer de la moitié orientale de l'île d'Ankoko et cesser d'occuper celle-ci, et agir de même s'agissant de tout autre territoire dont il est reconnu dans la sentence arbitrale de 1899 et l'accord de 1905 qu'il relève de la souveraineté territoriale du Guyana ;
d) le Venezuela doit s'abstenir de recourir à la menace ou à l'emploi de la force contre toute personne physique ou morale autorisée par le Guyana à mener une activité économique ou commerciale sur le territoire du Guyana tel que défini par la sentence arbitrale de 1899 et l'accord de 1905, ou dans tout espace maritime généré par ledit territoire et sur lequel le Guyana a souveraineté ou exerce des droits souverains, ainsi que d'y entraver toute activité menée par le Guyana ou avec son autorisation ;
e) la responsabilité internationale du Venezuela est engagée à raison de violations de la souveraineté et des droits souverains du Guyana et de tous les préjudices subis en conséquence par celui-ci.»
«Pour ces raisons, le Guyana prie respectueusement la Cour :
1. de dire qu'elle a compétence pour connaître des demandes présentées par le Guyana et que ces demandes sont recevables ; et
2. de procéder à l'examen de l'affaire au fond.»
«Sur la base de sa requête du 29 mars 2018, de son mémoire du 19 novembre 2018 et de ses exposés oraux, le Guyana prie respectueusement la Cour :
1. de dire qu'elle a compétence pour connaître des demandes présentées par le Guyana et que ces demandes sont recevables ; et
2. de procéder à l'examen de l'affaire au fond.»
«Un tribunal arbitral sera immédiatement constitué aux fins de déterminer le tracé de la ligne frontière entre la colonie de la Guyane britannique et les Etats-Unis du Venezuela.»
D'autres dispositions prévoyaient les modalités de l'arbitrage, y compris la constitution du tribunal, le lieu de l'arbitrage ou encore les règles applicables. Enfin, selon l'article XIII du traité de Washington,
«[l]es Hautes Parties contractantes s'engag[eai]ent à considérer la sentence du tribunal arbitral comme un règlement complet, parfait et définitif de toutes les questions soumises aux arbitres».
«La sentence a été le fruit d'une transaction politique conclue dans le dos du Venezuela et sacrifiant ses droits légitimes. La frontière a été démarquée de façon arbitraire, sans tenir compte des règles spécifiques établies par l'accord d'arbitrage ni des principes pertinents du droit international.
Le Venezuela ne saurait reconnaître une sentence rendue dans de telles conditions.»
Lors d'une allocution prononcée quelques jours plus tard, le 22 février 1962, devant la Quatrième Commission de l'Assemblée générale des Nations Unies, le Venezuela a réitéré sa position.
«Il sera institué une commission mixte chargée de rechercher des solutions satisfaisantes pour le règlement pratique du différend survenu entre le Venezuela et le Royaume-Uni du fait de la position du Venezuela, qui soutient que la sentence arbitrale de 1899 relative à la frontière entre la Guyane britannique et le Venezuela est nulle et non avenue.»
Le paragraphe 1 de l'article IV dispose en outre que, en cas d'échec de cette commission, les Gouvernements du Guyana et du Venezuela devront choisir un des moyens de règlement pacifique énoncés à l'article 33 de la Charte des Nations Unies. Conformément au paragraphe 2 de l'article IV, en cas de désaccord entre ces gouvernements, le choix du moyen de règlement devra être fait par un organisme international compétent sur lequel celles-ci se mettront d'accord, ou, à défaut, par le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.
«J'ai pris note des responsabilités que le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies pourrait être appelé à assumer au titre du paragraphe 2 de l'article IV de l'accord et je souhaite vous informer que je considère celles-ci comme étant de nature à pouvoir être assumées de manière appropriée par le Secrétaire général.»
«Le Venezuela est convaincu que, pour mettre en oeuvre les dispositions du paragraphe 2 de l'article IV de l'accord de Genève, l'organisme international le plus compétent est le Secrétaire général de l'ONU... Le Venezuela souhaite réaffirmer sa conviction que le plus pratique et le plus indiqué serait de confier le choix du moyen de règlement directement au Secrétaire général de l'ONU. Puisqu'il est manifeste qu'aucun accord n'existe entre les parties quant au choix d'un organisme international chargé de remplir les fonctions prévues au paragraphe 2 de l'article IV, force est de constater que cette fonction relève désormais de la responsabilité du Secrétaire général de l'ONU.»
Plus tard, dans une lettre en date du 28 mars 1983 adressée à son homologue vénézuélien, le ministre des affaires étrangères du Guyana a déclaré que celui-ci,
«constatant à regret que [le Venezuela] n'[était] pas disposé à engager des efforts sérieux pour arriver à un accord sur l'organisme international compétent à qui reviendrait le choix du moyen de règlement, consent[ait] par la présente à passer à l'étape suivante et, en conséquence, à s'en remettre, pour ce choix, au Secrétaire général de l'ONU».
«dans le cadre de ses fonctions... et, plus particulièrement, de la mission qui lui [était] conférée par l'accord de Genève de 1966 de choisir un moyen de règlement qui, de son point de vue, permettr[ait] d'aboutir à un règlement définitif et concluant... du différend».
Dans une lettre datée du 9 juillet 2015, le président du Venezuela a prié le Secrétaire général d'«entamer la procédure de désignation d'un chargé des bons offices».
«[s]i, à la fin 2017, le Secrétaire général conclut à l'absence de progrès significatifs en vue d'un accord complet sur le règlement du différend, il choisira la Cour internationale de Justice comme prochain moyen de règlement, sauf demande contraire présentée conjointement par les deux parties».
«à répondre aux attentes les plus élevées concernant le processus des «bons offices» au cours des douze prochains mois, conformément à la décision du Secrétaire général afin de parvenir à un règlement complet du différend et, si cela se révélait nécessaire par la suite, de recourir à la Cour internationale de Justice».
Il a réaffirmé cette position dans une lettre adressée au Secrétaire général le 22 décembre 2016.
«En conséquence, je me suis acquitté de la responsabilité qui m'incombait dans ledit cadre et, aucun progrès significatif n'ayant été réalisé en vue d'un accord complet sur le règlement du différend, j'ai retenu la Cour internationale de Justice comme prochain moyen d'atteindre cet objectif.»
«1) Si, dans les quatre ans qui suivront la date du présent Accord, la Commission mixte n'est pas arrivée à un accord complet sur la solution du différend, elle en référera, dans son rapport final, au Gouvernement guyanais et au Gouvernement vénézuélien pour toutes les questions en suspens. Ces gouvernements choisiront sans retard un des moyens de règlement pacifique énoncés à l'Article 33 de la Charte des Nations Unies.
2) Si, trois mois au plus tard après avoir reçu le rapport final, le Gouvernement guyanais et le Gouvernement vénézuélien ne sont pas parvenus à un accord sur le choix d'un des moyens de règlement prévus à l'Article 33 de la Charte des Nations Unies, ils s'en remettront, pour ce choix, à un organisme international compétent sur lequel ils se mettront d'accord, ou, s'ils n'arrivent pas à s'entendre sur ce point, au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies. Si les moyens ainsi choisis ne mènent pas à une solution du différend, ledit organisme ou, le cas échéant, le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, choisira un autre des moyens stipulés à l'Article 33 de la Charte des Nations Unies, et ainsi de suite, jusqu'à ce que le différend ait été résolu ou jusqu'à ce que tous les moyens de règlement pacifique envisagés dans la Charte aient été épuisés.»
«1. Les parties à tout différend dont la prolongation est susceptible de menacer le maintien de la paix et de la sécurité internationales doivent en rechercher la solution, avant tout, par voie de négociation, d'enquête, de médiation, de conciliation, d'arbitrage, de règlement judiciaire, de recours aux organismes ou accords régionaux, ou par d'autres moyens pacifiques de leur choix.
2. Le Conseil de sécurité, s'il le juge nécessaire, invite les parties à régler leur différend par de tels moyens.»
«aucune des dispositions du présent Accord ne sera interprétée comme constituant une renonciation totale ou partielle par le Royaume-Uni, la Guyane britannique ou le Venezuela à aucun des principes qu'ils invoquent pour revendiquer la souveraineté sur les territoires situés au Venezuela ou en Guyane britannique, ni à aucun des droits ou des revendications qu'ils ont précédemment cherché à faire valoir sur ces territoires, ou encore comme préjugeant leur position pour ce qui est d'admettre ou de refuser d'admettre un droit, une revendication ou un principe de revendication que l'un d'entre eux pourrait faire valoir pour réclamer la souveraineté sur ces territoires».
En faisant référence à la protection de leurs revendications et droits respectifs en matière de souveraineté sur ces territoires, les parties semblent avoir mis en exergue le fait que le «différend» («controversy» en anglais) visé dans l'accord de Genève concernait principalement le différend né de la position du Venezuela selon laquelle la sentence de 1899 était nulle et non avenue et ses implications pour le tracé de la frontière entre le Guyana et le Venezuela.
La première phrase du paragraphe 2 de l'article IV de l'accord de Genève énonce que les Parties «shall refer the decision... to the Secretary-General» (en français : «s'en remettront, pour ce choix... au Secrétaire général»). La Cour a déjà observé dans son arrêt sur les exceptions préliminaires en l'affaire relative aux Immunités et procédures pénales (Guinée équatoriale c. France) que l'emploi du terme «shall» dans les dispositions d'une convention devrait être interprété comme imposant une obligation aux Etats parties à cette convention (C.I.J. Recueil 2018 (I), p. 321, par. 92). Il en va de même s'agissant du paragraphe précité de l'accord de Genève. Le verbe «refer» (en français : «s'en remettre») qui est employé dans cette disposition marque l'idée de confier une question à une tierce personne. Quant au mot «decision», il n'est pas synonyme de «recommandation» et implique le caractère contraignant de l'acte pris par le Secrétaire général quant au choix du moyen de règlement. Considérés ensemble, ces termes indiquent que les Parties ont pris l'engagement juridique de respecter la décision de la tierce partie à laquelle elles ont conféré ce pouvoir, en l'espèce le Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies.
«il existait une possibilité qu[']une question d'une importance aussi vitale... que la détermination des moyens de règlement du différend échappe aux deux Parties directement intéressées et que la décision revienne à une institution internationale choisie par elles ou, à défaut, au Secrétaire général des Nations Unies».
«choisira un autre des moyens stipulés à l'Article 33 de la Charte des Nations Unies, et ainsi de suite, jusqu'à ce que le différend ait été résolu ou jusqu'à ce que tous les moyens de règlement pacifique envisagés dans la Charte aient été épuisés».
«Le paragraphe 2 de l'article IV de l'accord de Genève du 17 février 1966 se conclut par une alternative selon laquelle soit que la controverse a été résolue soit que tous les moyens de règlement pacifique prévus à l'article 33 de la Charte des Nations Unies ont été épuisés. Ma question est la suivante : Est-il possible de concevoir une situation où tous les moyens de règlement pacifique ont été épuisés sans que la controverse n'ait été résolue ?»
Dans sa réponse, le Guyana a soutenu qu'il n'était pas possible de concevoir une situation dans laquelle tous les moyens de règlement pacifique seraient épuisés sans que le différend ait été résolu. Selon lui, «[l]'accord de Genève de 1966 a établi une procédure visant à s'assurer de parvenir à un règlement complet et définitif du différend» et «[l]e fait que l'arbitrage et le règlement judiciaire figurent parmi les moyens énoncés à l'article 33 garantit un règlement complet et définitif du différend».
«L'accord signé à Genève le 17 février 1966 par le Gouvernement de la République du Venezuela et le Gouvernement du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord, en consultation avec le Gouvernement de la Guyane britannique, en vue de régler le désaccord entre le Venezuela et le Royaume-Uni au sujet du tracé de la frontière avec la Guyane britannique a été approuvé dans toutes ses dispositions et à toutes fins juridiques pertinentes.»
«J'ai l'honneur de me référer au différend qui s'est fait jour entre la République coopérative du Guyana et la République bolivarienne du Venezuela en raison de la position de cette dernière selon laquelle la sentence arbitrale de 1899 relative à la frontière entre la Guyane britannique et le Venezuela est nulle et non avenue (ci-après le «différend»).
Comme vous le savez, le paragraphe 2 de l'article IV de l'accord tendant à régler le différend entre le Venezuela et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord relatif à la frontière entre le Venezuela et la Guyane britannique, signé à Genève le 17 février 1966 (ci-après l'«accord de Genève»), confère au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies le pouvoir et la responsabilité de choisir, parmi les moyens de règlement pacifique prévus à l'article 33 de la Charte des Nations Unies, celui qu'il convient de retenir pour régler le différend.
Si le moyen ainsi choisi ne permet pas d'aboutir à un règlement du différend, le paragraphe 2 de l'article IV de l'accord de Genève confère ensuite au Secrétaire général la responsabilité de choisir un autre des moyens de règlement pacifique prévus à l'article 33 de la Charte.
Comme vous le savez également, mon prédécesseur, M. Ban Ki-moon, vous a communiqué, ainsi qu'au président de la République bolivarienne du Venezuela, un cadre aux fins du règlement du différend frontalier fondé sur ses conclusions quant aux mesures les plus appropriées à prendre. Il a notamment déterminé que la procédure des bons offices, qui avait été menée depuis 1990, se poursuivrait encore pendant un an, jusqu'à la fin 2017, avec un mandat renforcé de médiation. Il a également déterminé que, si je concluais alors, en ma qualité de nouveau Secrétaire général, à l'absence de progrès significatifs en vue d'un accord complet sur le règlement du différend, je choisirais la Cour internationale de Justice comme prochain moyen de règlement, sauf demande contraire présentée conjointement par les Gouvernements du Guyana et du Venezuela.
Au début de l'année 2017, j'ai désigné un représentant personnel, M. Dag Halvor Nylander, qui n'a pas ménagé ses efforts au plus haut niveau pour parvenir à un règlement négocié.
Conformément au cadre défini par mon prédécesseur, j'ai soigneusement analysé l'évolution de la procédure des bons offices au cours de l'année 2017.
En conséquence, je me suis acquitté de la responsabilité qui m'incombait dans ledit cadre et, aucun progrès significatif n'ayant été réalisé en vue d'un accord complet sur le règlement du différend, j'ai retenu la Cour internationale de Justice comme prochain moyen d'atteindre cet objectif.
Dans le même temps, j'estime que votre gouvernement et celui de la République bolivarienne du Venezuela pourraient toutefois continuer de bénéficier des bons offices de l'Organisation des Nations Unies via une procédure complémentaire établie sur la base des pouvoirs que me confère la Charte. Une procédure de bons offices pourrait offrir au moins les avantages ci-après.
Premièrement, si les deux gouvernements acceptaient cette offre de procédure complémentaire, j'estime que celle-ci pourrait favoriser l'utilisation du moyen de règlement pacifique retenu.
Deuxièmement, si les gouvernements souhaitaient tous deux tenter de régler le différend par la voie de négociations directes, parallèlement à une procédure judiciaire, une procédure de bons offices pourrait favoriser ces négociations.
Troisièmement, la relation bilatérale entre votre gouvernement et celui de la République bolivarienne du Venezuela ne se limitant pas au différend, les deux gouvernements pourraient souhaiter mettre à profit l'assistance d'un tiers pour traiter dans le cadre d'une procédure de bons offices tous autres points pendants importants.
Je ne doute pas qu'une procédure complémentaire de bons offices contribuerait en outre à perpétuer les relations amicales et de bon voisinage qui ont caractérisé les échanges entre les deux pays.
Pour conclure, je tiens à vous informer que la présente marche à suivre sera rendue publique. J'ai adressé au président de la République bolivarienne du Venezuela une lettre identique, dont je joins copie à la présente.»
«Après quelques discussions officieuses, notre délégation choisit de mettre sur la table une proposition analogue à cette troisième formule qui avait été rejetée à Londres, en y ajoutant le recours à la Cour internationale de Justice. Ayant examiné cette proposition de manière approfondie, les délégations de la Grande-Bretagne et de la Guyane britannique ¯# avant de se montrer finalement favorables ¯# s'opposèrent à la mention spécifique du recours à l'arbitrage et à la Cour internationale de Justice. Une fois l'objection contournée par substitution à cette mention spécifique de la référence à l'article 33 de la Charte des Nations Unies, qui prévoit ces deux procédures que sont l'arbitrage et le recours à la Cour internationale de Justice, la possibilité de parvenir à un accord redevint envisageable. C'est sur la base de cette proposition du Venezuela que l'accord de Genève fut conclu. Loin d'avoir été imposé, comme cela fut dit non sans malice, ou de relever d'un stratagème britannique auquel la délégation vénézuélienne se serait naïvement laissé prendre, l'accord se fonde sur une proposition du Venezuela qui avait, dans un premier temps, été rejetée à Londres, mais vient d'être acceptée à Genève.» (Les italiques sont de la Cour.)
La Cour considère que ces propos du ministre vénézuélien des affaires étrangères démontrent que, lorsqu'elles ont consenti à ce que le choix du Secrétaire général s'effectue parmi les moyens énoncés à l'article 33 de la Charte des Nations Unies, les parties à l'accord de Genève entendaient y inclure la possibilité de recourir à la Cour internationale de Justice.
«a[vait] tout fait pour que le préambule de l'accord reflète sa position de base, à savoir, premièrement, qu'il s'agissait d'examiner la question de fond concernant la frontière et non uniquement la validité de la sentence de 1899 et, deuxièmement, que tel avait été le fondement de[s] pourparlers tant à Londres qu'à Genève. Non sans difficulté, [il avait] persuadé le ministre vénézuélien des affaires étrangères d'accepter, dans un esprit de compromis, un libellé qui refl[éterait] les positions connues des parties.»
LA COUR,
1) Par douze voix contre quatre,
Dit qu'elle a compétence pour connaître de la requête déposée par la République coopérative du Guyana le 29 mars 2018 dans la mesure où elle se rapporte à la validité de la sentence arbitrale du 3 octobre 1899 et à la question connexe du règlement définitif du différend concernant la frontière terrestre entre la République coopérative du Guyana et la République bolivarienne du Venezuela ;
POUR : M. Yusuf, président; Mme Xue, vice-présidente; MM. Tomka, Cançado Trindade, Mmes Donoghue, Sebutinde, MM. Bhandari, Robinson, Crawford, Salam, Iwasawa, juges; Mme Charlesworth, juge ad hoc ;
CONTRE : MM. Abraham, Bennouna, Gaja, Gevorgian, juges ;
2) A l'unanimité,
Dit qu'elle n'a pas compétence pour connaître des demandes de la République coopérative du Guyana qui sont fondées sur des faits survenus après la signature de l'accord de Genève.
Fait en anglais et en français, le texte anglais faisant foi, au Palais de la Paix, à La Haye, le dix-huit décembre deux mille vingt, en trois exemplaires, dont l'un restera déposé aux archives de la Cour et les autres seront transmis respectivement au Gouvernement de la République coopérative du Guyana et au Gouvernement de la République bolivarienne du Venezuela.M. le juge TOMKA joint une déclaration à l'arrêt ; MM. les juges ABRAHAM et BENNOUNA joignent à l'arrêt les exposés de leur opinion dissidente ; MM. les juges GAJA et ROBINSON joignent chacun une déclaration à l'arrêt ; M. le juge GEVORGIAN joint à l'arrêt l'exposé de son opinion dissidente.
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